Cyber escroquerie au Burkina : Les limiers de la BCLCC veulent débusquer les filous qui se font passer pour des médecins
Lefaso.net
vendredi 9 septembre 2022
Début septembre 2022, le Méta a été envahi par des messages appelant à la vigilance sur une nouvelle forme d’arnaque. Celle-ci consiste pour l’escroc à se faire passer pour un médecin et à plumer d’honnêtes citoyens en leur faisant croire que leur proche, qui serait entre la vie et la mort, a urgemment besoin de soins, donc d’argent. Pris de panique, la victime obéit au doigt et à l’œil en faisant des transferts d’argent sur un numéro indiqué par l’aigrefin.
« Les flatteurs et les escrocs ressemblent assez aux lutteurs. Ils se retournent de tous les sens pour abattre ceux qu’ils attaquent  », disait le poète Alexander Pope dans “Les maximes et réflexions morales’’. Eh bien ! Avec le développement du numérique, les escrocs rivalisent d’adresse pour gruger les citoyens candides et/ou cupides. Ceux qui sont à plaindre sont ces victimes qui agissent de bonne foi comme Bagagnan Adama, qui n’a pas réussi à déceler à temps la supercherie d’un escroc qui s’est fait passer pour un médecin du service traumatologie du CHU de Tengandogo.
Un phénomène qui refait surface
L’arnaque consiste à soutirer le maximum d’argent à la victime en lui demandant d’effectuer un transfert d’argent pour l’achat de médicaments pour la prise en charge d’un proche victime d’accident de la circulation. La victime n’a pas toujours la présence d’esprit d’appeler le proche en question pour vérifier l’information. Selon la Brigade centrale de lutte contre la cybercriminalité (BCLCC), les premières plaintes enregistrées au niveau des services de police et de gendarmerie remontent à 2018. Il s’agit donc d’un phénomène qui refait surface après avoir fait plusieurs victimes dans la sous-région notamment au Bénin et en Côte d’Ivoire.
Des préjudices pouvant atteindre 200 000 F CFA
A en croire le responsable de la communication de la BCLCC, Guesrima Aimé Ouédraogo, la Brigade enregistre depuis quelque temps 10 à 15 plaintes liées à ce type d’arnaque. « Pour tous ceux qui viennent vers nous, le préjudice pour chaque plaignant s’élève à approximativement 50 000, voire 75 000 F CFA. À l’échelle de 100 personnes, cela représente beaucoup d’argent. Dans l’audio qui circulait sur les différentes plateformes numériques, la dame en question a déboursé la somme de 200 000 F CFA. Elle a passé son temps à faire plusieurs dépôts lorsqu’on lui a dit que sa sÅ“ur est hospitalisée. C’est un agent d’une boutique de mobile money qui a attiré son attention, car plusieurs personnes venues faire des dépôts d’argent avaient vécu la même histoire  », relate Aimé Ouédraogo.
Plus de 150 000 F CFA escroqués au frère d’un enseignant
A l’en croire, toutes les couches socioprofessionnelles sont touchées par ce types d’arnaques aussi bien à Ouagadougou que dans les autres villes du Burkina Faso.
Parmi les cas traités par la brigade, il y a l’histoire de cet escroc qui s’est payé la tête d’un homme en lui annonçant que son frère, enseignant de profession en province, a été victime d’un accident de la circulation et qu’il est en train de l’évacuer sur Ouagadougou à bord de son véhicule.
« À un moment donné, il dit au frère de l’accidenté qu’il est en panne sèche et qu’il souhaite qu’il lui envoie de l’argent pour l’achat du carburant. Le frère fait un dépôt de 50 000 F CFA. Par la suite, l’escroc dit qu’il a cherché la clinique la plus proche et qu’il fallait à présent honorer les ordonnances, puis l’oxygène. Le frère a envoyé la somme de 60 000 F CFA. Après la clinique, l’escroc rappelle pour dire que les quatre roues de son véhicule ont crevé et qu’il faut la somme de 50 000 F CFA pour réparer le véhicule. Constatant qu’il y a anguille sous roche, la victime décide d’appeler son frère soi-disant accidenté. Celui-ci décroche et affirme qu’il se porte bien et est à son poste en province  », narre le chargé de communication de la BCLCC.
« L’objectif est de vous emmener à faire des dépôts et vous faire balader  »
Comment reconnaître l’arnaque au bout du fil ? Selon Aimé Ouédraogo, les escrocs ne disposent pas généralement pas d’assez d’informations sur les proches de leurs potentielles victimes. « C’est peut-être le nom, le prénom et la profession qu’ils ont. Si vous leur posez un certain nombre de questions, vous vous rendrez compte qu’ils ne disposent pas d’assez d’informations sur votre proche. Et lorsque vous dites aux cyber escrocs que vous êtes en route pour l’hôpital, ils trouveront toujours quelque chose pour vous ralentir. L’objectif est de vous emmener à faire des dépôts et vous faire balader.  », a indiqué Aimé Ouédraogo qui conseille toujours aux personnes qui reçoivent de tels coups de dire à leur interlocuteur qu’elles se rendraient elles-mêmes à l’hôpital.
Les infractions cybercriminelles les plus courantes
Au premier semestre de l’année 2022, la Brigade centrale de lutte contre la cybercriminalité a enregistré plusieurs infractions. Les plus courantes sont le chantage à la webcam, l’arnaque à la sève de moringa, l’arnaque via les services de mobile money, l’arnaque au trading ou aux crypto monnaies. « Il y a une dame qui a motivé son époux qui a pris un prêt de 10 millions à la banque. Elle aussi a pris un prêt de 10 millions. La famille a investi tous les 20 millions. Hélas, la plateforme a cramé Et jusqu’aujourd’hui les deux sont en train de rembourser un prêt inutile parce que l’argent n’a pas été utilisé à bon escient  », regrette le chargé de communication de la BCLCC.
En attendant que la BCLCC ne mette le grappin sur les cyber délinquants, Aimé Ouédraogo recommande la vigilance et une utilisation responsable des technologies de l’information et de la communication. La brigade invite les Burkinabè à signaler tout cas suspect en contactant ses équipes par mail à l’adresse cybercrime@securite.gov.bf ou en appelant au 25395842.
Herman Frédéric Bassolé
LeFaso.net