« Les médias africains à l’heure du numérique » : Un important ouvrage pour saisir les évolutions engendrées par les TIC
samedi 9 octobre 2010
<img134|left>La parution est encore très récente- septembre 2010- mais le cinquième ouvrage des cahiers de NETSUDS « Les médias africains à l’heure du numérique » sera sans doute d’une grande utilité pour les décideurs, les professionnels et les partenaires du secteur de l’information et de la communication en Afrique. Notamment en ces temps des nouvelles technologies qui offrent des opportunités de produire et de consommer l’information autrement.
Produit à partir d’enquêtes de terrain par des chercheurs ou professionnels s’intéressant au secteur, l’ouvrage plonge en effet, à travers des expériences d’ici et d’ailleurs, au cœur de la réalité des pratiques journalistiques à l’ère du numérique.
De la lecture du livre un constat s’impose : Si les technologies de l’information et de la communication sont de plus en plus utilisées par les acteurs des médias africains, leurs usages sont encore loin de produire dans l’ensemble la révolution tant annoncée, tellement l’appropriation se fait lentement.
Dr Claudio Jones, responsable du journal de 20 h à la télévision mozambicaine ; Dr Cyriaque Paré, directeur de la Direction de la Communication et de l’information du Premier ministère du Burkina ; Dr Moda Gueye et Dr N’Diaye du Sénégal ; Sidiki Bamba de la Côte d’Ivoire ; Norbert N. Ouendji du Cameroun ; et Dr Etienne L. Damome. Ce sont eux les auteurs de : « Les médias africains à l’heure du numérique ». Et c’est sous la direction de 2 éminents professeurs, en l’occurrence Annie Lenoble-Bart et Annie Chéneau-Loquay, que ces docteurs en sciences de l’information et de la communication, tous membres du Groupe de recherche sur les médias africains (GREMA), ont produit cet ouvrage de belle facture, édité par L’Harmattan.
Paru seulement en septembre dernier, le livre compte 135 pages et comporte 7 articles. Le premier article signé du Dr Claudio Jone et intitulé « De la rotative au faxe et du fax au web : la longue marche de la démocratisation de la presse au Mozambique », aborde la lutte de la presse mozambicaine pour la pluralité d’opinions. Il montre comment la diffusion par fax avant via le web est devenue l’instrument de la nouvelle presse libre qui contourne par ces technologies le monopole étatique de la presse traditionnelle quotidienne mais aussi les manœuvres du pouvoir politique. Le 2e article « Médias et société de l’information en Afrique : la difficile révolution du multimédia dans les médias ouest-africains » est l’œuvre du Dr Cyriaque Paré du Burkina. Dans cette section le chercheur burkinabè traite de l’appropriation réelle des TIC par les médias africains à travers une analyse de contenu des sites médias d’une dizaine de pays de l’Afrique de l’Ouest. Et voici son constat : « Si les discours sur les vertus des TIC sont presque toujours aussi enthousiastes, l’on note que les promesses de la révolution de l’information, du multimédia, peinent à se réaliser véritablement dans le secteur des médias en Afrique, malgré l’expansion de la technologie Internet sur le continent et le développement quasi-exponentiel des sites. Car, en dépit de leur cyber-audience de plus en plus grandissante, les médias africains restent plus que jamais confrontés aux mêmes difficultés économiques, financières, technologiques.
La cyber-audience en pleine évolution est également abordée par Moda Gueye et Sidiki Bamba dans leurs articles qui abordent successivement l’engouement des Sénégalais de la diaspora pour les sites portails ; et l’occupation du cyberspace par de nombreux journaux ivoiriens, soit par le biais du portail abidjan.net, soit par des sites propres à ces journaux. Autant de nouveaux comportements qui démontrent quelque part le caractère irréversible de la colonisation des médias du sud par les TIC. Une colonisation numérique qui se manifeste aussi par l’existence dans certains pays (Burkina et Togo) du phénomène de diffusion radiophonique en ligne « webradio », comme le relève Etienne L. Damome de l’Université de Bordeaux, dans son article intitulé « Radios africaines et internet : usages, fonctions et défis ». Autres usages des TIC dans les pratiques des professionnels des médias africains : les blogs et les SMS. Ces 2 sujets ont été successivement abordés par Dr Mamadou NDiaye et Dr Norbert N. Ouendji.
Bref, « Les médias africains à l’heure du numérique » constitue une sorte de répertoire des comportements et des pratiques des acteurs des médias du continent à l’ère des TIC. A vrai dire, un outil d’une grande portée pour appréhender les évolutions engendrées par les nouvelles technologies dans le secteur de l’information en Afrique subsaharienne. A ce titre, c’est un ouvrage intéressant aussi bien pour les étudiants, les chercheurs, les professionnels que pour les décideurs politiques.
Par Grégoire B. BAZIE
Lefaso.net
Les médias africains à l’heure du numérique
Annie Lenoble-Bart et Annie Chéneau-Loquay (dir.)
L’Harmattan, 2010, 135 pages
Prix : 14,50 euros