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« Le tout-numérique pour le Burkina Faso », la grande ambition du ministre du Développement de l’Economie numérique et des Postes, Hadja Ouattara/Sanon

mardi 16 janvier 2018

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Une femme d’action et non de discours. Ainsi se définissait-elle, lors de son installation, le 23 février 2017, au poste de ministre du Développement de l’Economie numérique et des Postes. Onze mois après, Hadja Ouattara/Sanon a-t-elle insufflé une nouvelle dynamique à la politique du gouvernement en matière de développement des technologies de l’information et de la communication ? Quel est l’état d’avancement des projets et programmes conduits sous le magister de celle qui affectionne tant le concept « digitalisation ». Réponse dans cet entretien réalisé en ligne, le 4 janvier 2018. Lisez !


Lefaso.net : Près d’un an que vous avez été appelée à conduire la politique du gouvernement en matière de développement de l’économie numérique ; dans quel état d’esprit vous trouvez-vous aujourd’hui ?

Hadja Ouattara/Sanon : Il a plu aux plus autorités de notre pays de m’appeler à servir au sein du gouvernement. Je rends grâce au Dieu Tout-puissant et remercie Son Excellence Monsieur le Président du Faso et le Premier ministre pour cette confiance placée en ma personne. Mon état d’esprit reste le même depuis ma prise de service à nos jours. C’est celui d’une femme convaincue de la capacité de notre pays d’aller au tout numérique. Vous savez que le numérique est omniprésent dans notre vie quotidienne. En effet, l’avènement des technologies mobiles a démocratisé l’usage du téléphone et d’internet avec un impact réel sur l’ensemble des activités des Burkinabè.

J’en veux pour preuve le système d’information sur le marché des céréales, les transferts instantanés de devises, les applications de gestion pharmaceutiques, le traitement informatisé des salaires, le circuit intégré de la dépense, etc., toutes choses qui confortent le gouvernement dans sa volonté de faire des TIC un levier de croissance et de développement inclusif.

Titulaire d’un diplôme d’Ingénieur des travaux informatiques et d’un Master professionnel en Réseau informatique et Multimédia, vous êtes vue comme une femme de terrain. D’ailleurs lors de votre installation le 23 février 2017, vous vous êtes définie comme étant une femme d’action et non de discours. Pouvez-vous nous parler des réalisations majeures faites par votre département depuis lors ?

Je vous remercie pour cette question. Je pense qu’il est trop tôt de vouloir dresser un bilan des réalisations du ministère du Développement de l’Economie numérique et des Postes sous mon leadership. Cependant, je voudrais souligner que le ministère dont j’ai la charge a engagé un certain nombre d’actions sur plusieurs fronts de développement.

Primo, en soutien aux acteurs du secteur (que sont les opérateurs, les fournisseurs d’accès Internet, l’administration, etc.), le département contribue à apporter des solutions structurelles aux différents problèmes de connexion et de qualité de réseaux en mettant en place des projets d’infrastructures de communication de base en vue de fluidifier la connectivité intérieure et l’accès à internet.

Rentrent dans ce cadre les projets d’infrastructures réseaux tel que les projets Backbone national des télécommunications et G-Cloud qui visent à déployer un réseau fédérateur en fibre optique à l’échelle nationale avec accès à tous les pays voisins. Les réceptions pour la phase 1 sont prévues au plus tard au 1ier trimestre 2019.

A ces projets s’ajoutent, toujours au profit des acteurs, deux autres projets d’infrastructures complémentaires que sont le Point d’atterrissement virtuel (PAV) qui sera un point unique d’accès à la bande passante internationale et le Point d’échange Internet qui est un « bureau d’échange » pour le trafic Internet. Les réceptions sont en cours et les équipements seront en exploitation d’ici fin février 2018.

Enfin, pour les besoins de l’administration, un certain nombre d’actions sont aussi engagées dont le projet de renforcement et d’extension du Réseau informatique national de l’administration (RESINA) et le projet d’Appui au développement des TIC (PADTIC), afin de doter toutes les composantes de l’administration aussi bien centrale que décentralisée, d’une connectivité et des services de communications de qualité
Secundo, sur le front du développement de plateformes pour appuyer la gouvernance au Burkina Faso, nous avons pu mettre sur orbite un important projet qu’est le projet e-Burkina dont le lancement est intervenu, le mardi 07 novembre dernier, sous le haut patronage de SEM le Premier ministre.

L’objectif poursuivi est d’encourager une meilleure gouvernance dans le secteur public à travers l’adoption par l’administration publique de plateformes numériques et de services partagés pour améliorer les échanges de données entre les unités gouvernementales et la population. Le projet entend également promouvoir le partage de l’information, les innovations et les effets d’échelle pour accroître les revenus, la résilience et les emplois dans les principaux secteurs économiques du pays.

A ce projet, vient s’ajouter le projet de mise en place d’une plateforme G-Cloud au profit de l’administration, des entreprises et des citoyens. Les objectifs phares de ce projet est de permettre notamment le stockage des données, le partage des actifs numériques avec les développeurs, les propriétaires de bases de données et une plateforme e-learning

Tertio, mon département œuvre au développement de l’industrie numérique dans notre pays. Dans ce cadre, il est institué des marathons de développement de logiciels dénommé « hackathons ». C’est une plateforme permettant aux jeunes développeurs de vendre leurs produits et leurs talents. Ces jeunes sont ensuite placés au sein de structures de soutien et d’accompagnement pour les inciter à libérer leur génie et proposer des solutions TIC novatrices à haute valeur ajoutée. D’ailleurs, c’est comme je l’avais dit à ma prise de fonction : je compte m’appuyer « fortement sur la jeunesse et en osant des politiques innovantes et ambitieuses ».

Enfin, mon département, dans le souci de professionnaliser l’entrepreneuriat dans le secteur du numérique et d’y instaurer la culture de l’excellence, a mis en place un agrément technique en matière informatique dont le lancement des activités de délivrance est intervenu le 27 décembre 2017. Je salue au passage son appropriation par les acteurs du secteur qui s’est traduite par leur présence massive à la cérémonie de lancement. Cet agrément est un label de qualité attribué aux entreprises du numérique, suite à un examen minutieux de leur personnel, leur outillage technique et leur environnement de travail.

Parmi les grands programmes d’infrastructures de votre département figure en bonne place le projet backbone national des télécommunications lancé à Gaoua à l’occasion des festivités du 11 décembre 2017. Quels sont les enjeux d’un tel projet ?

Le Conseil des Ministres en sa séance du 31 mai 2017 a décidé de mettre en œuvre la première phase du projet backbone national des télécommunications, et le lancement est intervenu précisément le 10 décembre dernier à Gaoua sous le très haut patronage de SEM le Président du Faso. Cette première phase d’une longueur de 2001 km de câble à fibres optique a un délai d’exécution de 14 mois et permettra de connecter une cinquantaine de chefs-lieux de communes.

A terme, avec plus de 10 000 km de longueur, le backbone national des télécommunications sera un réseau de communications fédérateur en fibres optiques à l’échelle nationale, reliant tous les 351 chefs-lieux de communes et tous les six pays voisins contribuant ainsi à l’amélioration de la connectivité nationale et internationale en large bande par une infrastructure en fibre optique mutualisée. Ce sera un réseau qui va servir de support aussi bien pour les opérateurs, les fournisseurs d’accès Internet, que pour l’administration etc.

Ce projet contribuera donc à résoudre le problème de capacité, de fiabilité, de disponibilité de réseaux et partant de la qualité de services.
En somme, il vise à doter le secteur de l’économie numérique d’une infrastructure de communication de base susceptible de supporter les services de nouvelles générations présents et à venir afin de permettre à notre pays de profiter efficacement de tout le potentiel du numérique pour son développement.
C’est donc un important projet pour notre pays car comme l’a dit un de mes collègues « les TIC c’est l’autre nom du développement ».

Approuvé le 19 juin 2013, en conseil des ministres, le projet a pourtant accusé un retard avant son démarrage. Qu’est-ce qui peut bien expliquer une telle situation ?

Effectivement, le Conseil des ministres en sa séance du 19 juin 2013, avait autorisé la signature d’un contrat entre l’Etat burkinabè et la société de droit singapourien HUAWEI INTERNATIONAL PTE LIMITED pour la réalisation de 5 443 Km de dorsal de télécommunications (backbone) en fibre optique. N’ayant pas géré le dossier en son temps, je ne puis vous donner les raisons de ce retard.

Mais, je peux simplement relever que le gouvernement actuel estime et avec juste raison, que le numérique est un puissant facteur de modernisation de l’Administration, de promotion de la bonne gouvernance sous toutes ses formes et d’appui à la production de richesses. Au regard donc de tous ces bienfaits qu’offre le numérique, le gouvernement accorde une place importante au numérique. C’est pourquoi en lieu et place de 5 000 km de fibres optiques initialement prévus, nous sommes actuellement à une projection de 10 000 km pour mailler l’ensemble du territoire national. C’est ce qui justifie aussi, l’inscription du développement du numérique dans la liste restreinte des priorités nationales avec la mise en œuvre effective de la première phase du Backbone national.

Vous l’avez dit, le Projet « E-Burkina » est aussi l’un des plus grands projets de services de votre gouvernement qui sera orienté vers le développement des services en ligne. Et qui dit services en ligne dit également connectivité et surtout sécurité. Vu les récentes attaques de sites gouvernementaux burkinabè, quelles assurances donnez-vous que la sécurité sera au cœur de ce vaste projet ?

Avant tout commentaire, permettez-moi de saluer le professionnalisme des équipes techniques qui ont permis de circonscrire le champ de nuisance de ces cybercriminels et de réhabiliter les différents sites attaqués. Aucune administration n’est à l’abri de ces cybercriminels. Le défi qui nous est ici lancé est de travailler à minimiser ce phénomène.

Dans le domaine du numérique, plus de 80% des attaques informatiques découlent d’une erreur humaine. Pour y faire face efficacement, il faut mobiliser environ 80% de procédures et 20% d’outils. Ainsi, le Gouvernement, à travers l’Agence Nationale de Sécurité des Systèmes d’Information (ANSSI) et l’Agence Nationale de Promotion des Technologies de l’Information et de la Communication (ANPTIC), travaille profondément sur cette problématique pour garantir une sûreté maximale aux services et plateformes en ligne qui seront développés dans le cadre du projet e-Burkina. Aussi, un référentiel de management de la qualité et un référentiel général de sécurité des systèmes d’information avec la contribution des normes de sécurité informatique comme la famille ISO27000 seront implémentés pour garantir la disponibilité, l’intégrité, la confidentialité et la non-répudiation des transactions électroniques.
L’autre pan de la question est la répression des cybercriminels.

Sur ce plan, notre pays dispose de la loi 010/2010 relative à la protection des données à caractère personnel en complément au code pénal et au code de procédures pénales qui sont en relecture pour prendre en compte les nouvelles infractions liées au numérique. Les instruments juridiques communautaires et internationaux comme la Convention de l’Union Africaine (UA) sur la Cybersécurité et la protection des données à caractère personnel et la convention de Budapest sur la cybercriminalité seront bientôt internalisés pour renforcer davantage notre dispositif juridique national.

« Favoriser la naissance et l’émergence de PME/PMI structurantes, innovantes et viables à travers un mécanisme nouveau de financement adapté à l’auto-emploi », tel est l’objectif du projet Burkina’ Start-up lancé par votre gouvernement au second semestre de 2017. Où en êtes-vous avec ce projet ?

C’est un projet qui est mis en œuvre par le département en charge des finances et du développement. Il prend en compte tous les domaines de développement socio-économiques y compris celui du numérique. Ma collègue sera mieux placée pour répondre à cette question avec beaucoup plus de précisions. Cependant, il convient de souligner qu’il s’agit d’un projet profondément digitalisé, en ce sens que l’intégralité des opérations du processus de soumission et de traitement des idées de projet est opérée en ligne.

Pour ce qui est de votre domaine, le numérique, que faut-il pour que les start-up soient de véritables opportunités pour les jeunes pour s’autoemployer et lutter contre le chômage ?

L’apport principal de mon département ministériel c’est de créer les conditions nécessaires à la mise à disposition des usagers (individus, entreprises, Administration publique) de services digitalisés de qualité et abordables. C’est cela qui permettra à tous de profiter du potentiel des télécommunications/TIC.

Des initiatives sont développées notamment dans le domaine de la formation, de la détection et l’accompagnement des talents, de la mise en place d’incubateurs particulièrement à travers le projet de TECHNOPOLE TIC.

Je note également avec satisfaction l’émergence d’acteurs qui œuvrent dans la promotion des startups. Il s’agit des incubateurs mis en place par des acteurs privés. Ces dernières années nous avons noté la création de ce type d’entreprises qui offrent des conditions favorables au développement des startups et avec lesquelles mon département coopère.

En somme dans le domaine du numérique, nous devons œuvrer à mettre à disposition des services de qualité et un environnement approprié pour le développement des startups.

Pour Koura, une association qui lutte pour un entrepreneuriat innovant, il n’existe pas véritablement de startups au Burkina au regard des quatre critères d’une start-up à savoir la temporalité, le business plan, l’industrialisation/reproductivité et la scalabilité. Partagez-vous leur analyse ?

Je suis d’avis que dans ce domaine nous sommes à un stade embryonnaire. Comme je le disais tantôt, pour profiter réellement du potentiel du numérique, il faut qu’il y ait des réseaux et des services de qualité (service téléphonique et services de données).
Bien que nous ayons fait des progrès depuis les réformes entreprises à la fin des années 1990, des défis demeurent. C’est tout le sens des actions que mène le gouvernement à travers mon département actuellement.

L’aboutissement des projets d’infrastructure, de promotion de contenus locaux vont améliorer l’accès aux services au bénéfice de tous les usagers et particulièrement des entreprises.

En Afrique, le Rwanda est considéré comme un modèle en matière de développement de l’industrie du numérique. Vous êtes de ceux-là qui pensent que le numérique permettra au continent de rattraper son retard en matière de développement. Quelle doit être la recette ?

Je suis effectivement convaincue, de même que les plus hautes autorités, que le numérique constitue un véritable vivier de développement. Pour ce faire, la recette principale est d’investir dans les infrastructures et le suivi et l’accompagnement des jeunes développeurs, de sorte à en faire des start-ups. C’est pourquoi mon département organise chaque année le concours GENIE TIC, chargé de détecter des jeunes talents en TIC pour faciliter leur suivi et leur accompagnement.

La « digitalisation », un concept que vous affectionnez bien dans vos discours. Que renferme-t-il exactement ?

En parlant de « digitalisation », nous faisons référence à la transformation numérique des biens et services ainsi qu’à la dématérialisation intégrale des processus et procédures. Nous avons une grande ambition, celle du tout numérique pour le Burkina Faso. C’est pour cela que nous sommes en train de faire d’importants efforts pour réaliser les infrastructures nécessaires pour que cela soit une réalité dans notre pays.

Revenons sur l’agrément technique en matière informatique (ATI) que votre département a rendu obligatoire à compter de janvier 2018. Qu’est-ce qui a motivé cette décision et quelles sont les conditions pour obtenir l’obtenir ?

Comme je le disais tantôt, nous sommes conscients du rôle important que jouent les entreprises du numérique dans le processus de digitalisation de notre pays. C’est pourquoi le ministère dont j’ai la charge a institué un agrément technique en matière informatique pour organiser et professionnaliser davantage l’entrepreneuriat dans le secteur. Comme je l’ai dit dans mon discours de lancement de l’agrément technique, en plus d’améliorer la qualité des services attendus des entreprises, il vise à ancrer durablement celles-ci dans la culture de l’excellence. L’agrément technique vise à faire des entreprises du numérique, des acteurs à part entière dans le processus de digitalisation de notre pays.

Pour disposer de ce label, il faut être une entreprise légalement constituée et exprimer le désir à travers la constitution et la soumission d’un dossier de demande auprès de la Direction générale des Technologies de l’Information et de la Communication. Trois critères sont examinés avant la délivrance de l’agrément : il s’agit du personnel, de l’outillage technique et de l’environnement de travail de l’entreprise candidate.

Où en êtes-vous avec le processus ?

Hadja Ouattara/Sanon : Disons que les résultats à ce jour sont assez appréciables. Déjà, soixante-deux entreprises en sont titulaires avec une très forte option pour le domaine de la vente, l’installation et la maintenance de matériels et logiciels informatiques. Les domaines tels que les réseaux informatiques, la formation en informatique, les études, audits et conseil en informatiques, s’ils ne sont généralement pas à titre individuel retenus en option, sont fondus dans le domaine intégration de solutions informatiques qui est un choix à multiple compétences.
Malgré l’ajustement technique concernant le report de la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2018, la procédure est demeurée active, enregistrant et instruisant les nouvelles demandes.

En dehors de l’ATI, quelles sont les perspectives pour 2018 au niveau du ministère ?

Nos perspectives sont nombreuses pour cette année 2018. Outre la poursuite du développement des infrastructures de communications électroniques et des services en ligne, mon département prévoit la mise en place d’un identifiant unique de la personne au Burkina Faso. Cela se traduira dans une première phase par l’organisation d’un atelier national sur la question d’ici la fin du premier trimestre. Nous allons à cette occasion accueillir des experts du domaine qui viendront des pays amis tels que le Rwanda, l’Inde et l’Estonie.

Rappelons que ces différents pays sont déjà avancés sur la question et le partage de leurs expériences nous sera enrichissant.
Aussi, il sera question d’améliorer le cadre règlementaire du numérique et la promotion de l’insertion professionnelle des jeunes en procédant respectivement à un audit du cadre juridique en lien avec le développement des e-services et la dématérialisation ainsi qu’à la promotion du « P@sseport TIC » qui est un certificat (similaire au TOEFL de la langue anglaise) de reconnaissance au profit de son titulaire en maitrise de l’usage des outils numériques.

L’autre gros chantier est l’évaluation finale des cyberstratégies e-gouvernement, e-éducation et e-commerce adoptées en janvier 2013 pour la période 2013-2017 et la formulation d’un programme ambitieux d’intégration des TIC dans les secteurs sociaux.

L’une des actualités phares de l’année 2017 a été l’abrogation de la neutralité de l’Internet au mois de décembre. Cette décision a-t-elle surpris le Burkina Faso ?

D’emblée je dois préciser que cette décision de remise en cause de la neutralité de l’Internet a été prise par la Commission fédérale Communication (FCC), le régulateur des télécommunications des Etats-Unis d’Amérique qui a substitué à ce principe une obligation de transparence à la charge des opérateurs de télécommunications ou des fournisseurs d’accès internet. A la question de savoir si cela nous a surpris je répondrai par l’affirmative dans ce sens où l’arbitrage entre les promoteurs et les opposants à la neutralité aux Etats-Unis avait été tranché en faveur des promoteurs par l’administration du Président Obama.

Et quelles pourraient être les conséquences d’une telle décision si elle était entérinée par la justice américaine ?

Le principe de la neutralité du réseau vise à garantir la non -discrimination à l’égard des contenus transmis sur le réseau de la part des fournisseurs d’accès ou des opérateurs de télécommunication. C’est un principe protecteur des usagers et de leur liberté de communiquer.

C’est aussi ce qui a favorisé le développement d’entreprises comme Google, Facebook et Twitter grâce à la circulation libre sans limitation des contenus aussi bien aux Etats-Unis que dans le reste du monde.

Si la décision est entérinée l’égalité de traitement des flux sur le réseau sera abolie de fait et les opérateurs vont traiter ces flux selon les nouvelles règles adoptées.
C’est une victoire incontestable pour les fournisseurs d’accès aux Etats-Unis qui ont toujours combattu le principe de la neutralité du net.

Parlant d’Internet, une récente étude menée en 2017 par le site britannique Câble sur les coûts de l’internet dans 196 pays révèle que le Burkina Faso a le coût le plus élevé de l’internet Haut-débit, soit 966,89 dollars américains (536 000 francs CFA). Cela vous a-t-il choqué ? Y accordez-vous du crédit ?

Au-delà des statistiques ou des classements faits çà et là, je suis consciente en tant que ministre chargé des télécommunications/TIC que d’énormes défis se posent à nous dans ce domaine. Je voudrais de ce fait relever que bien que le coût réel sur le marché dans notre pays soit en deçà des chiffres communiqués, notre challenge est de travailler à rendre l’internet encore beaucoup plus accessible à notre peuple. Et c’est ce défi que nous travaillons à relever à travers la mise en œuvre d’importants projets dont entre autres le projet Backbone national, le point d’atterrissement virtuel et le point d’échange internet.

Le budget de la 13e édition de la semaine nationale de l’internet (SNI) était de près de 200 millions de francs CFA en 2017. Un montant jugé énorme par certains Burkinabè qui jugent inutile l’organisation d’un tel événement ou par d’autres qui préconisent qu’il soit organisé tous les deux ans plutôt que chaque année. Un commentaire ?

La Semaine Nationale de l’Internet et des TIC (SNI) édition 2017 s’est tenue à Ouagadougou du 07 au 11 novembre 2017 sous le thème : « TIC et sécurité ». Comme vous le constatez, c’est une manifestation nationale annuelle et thématique qui crée de plus en plus de l’engouement. Au regard de l’importance qu’elle revêt pour le secteur du numérique, la plupart des acteurs du domaine n’hésitent pas à soutenir son organisation. Pour cette édition, le budget a été évalué à 170 millions de FCFA. A la SNI 2017, comme nous l’avons voulu, la réflexion a pris le dessus sur le caractère festif. Beaucoup de communications en panels, beaucoup d’émissions télé, radio, ont contribué à sensibiliser notre peuple sur la thématique de l’année. Elle a constitué également un tremplin de découverte de nouveaux talents en TIC.

Des jeunes en effet ont présenté des solutions TIC qui, si elles étaient bien suivies, pourraient aider à résoudre certains pans de notre problème de sécurité. Au regard donc de tous ces résultats, nous pouvons estimer que le budget est modeste. Concernant la périodicité, le débat a été lancé à l’atelier bilan des 10 ans de la SNI. Mais le caractère annuel l’a emporté sur le biennal parce que les acteurs ont estimé que c’est un domaine très évolutif.

A la clôture de la SNI, votre département s’est engagé à accompagner les lauréats du Hackathon 226. Où en êtes-vous avec les différents projets présentés ?

C’est un processus en cours. Les négociations sont en cours afin de les placer dans des entreprises-incubateurs pour leur suivi et leur accompagnement. Les lauréats du concours GENIE TIC 2016 sont déjà suivis par ces entreprises. A l’issue de cet encadrement, les différents lauréats auront muri leur projet de sorte qu’ils soient utilisables par les entreprises et les institutions qui le souhaitent.

Les Postes, une composante de votre ministère et moins connue des Burkinabè. Quels sont grands projets réalisés ou en cours dans ce domaine ?

Et pourtant la SONAPOST est une société qui se rapproche de plus en plus de la population surtout dans les zones rurales. Elle continue sans cesse de déployer ses services sur l’ensemble du territoire national. Rien que courant octobre 2017, nous avons inauguré l’agence SONAPOST de Tanghin-Dassouri.

Avec le développement du numérique, la mort des services postaux n’est-elle pas programmée ? Comment maintenir la poste à l’ère du numérique ?

Effectivement avec l’avènement du Numérique et la concurrence des coursiers privés, la survie des activités postales au sein de la Poste était réellement menacée. Mais la SONAPOST a pu s’adapter à ce nouvel environnement et a saisi les multiples opportunités qu’offrent les Technologies de l’Information et de la Communication pour engager des réformes dans le cadre de la mise en œuvre de son Plan stratégique 2013-2022.

Ces reformes portent notamment sur la restructuration des services financiers postaux pour mieux les adapter aux besoins de la clientèle et sur les possibilités de faire de la Société un acteur majeur du commerce électronique dans notre pays.

Un dernier mot ?

Je voudrais dire à nos concitoyens que nous travaillons à rendre accessibles l’internet et les communications électroniques. Avec les différents projets en voie d’exécution, nous avons bon espoir que la population aura accès à internet haut début d’ici à la fin de ces travaux et que les services postaux seront modernisés.
Je remercie lefaso.net pour cette occasion qu’il nous a offerte, de parler de nos projets à ses lecteurs.
Je vous remercie !

Entretien réalisé en ligne par Herman F. Bassolé
Lefaso.net