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Laurent Gilles, enseignant-chercheur à Telecom Paris Tech : « Les Africains sur-utilisent les services de communications par rapport à leur niveau de revenu économique »

lundi 31 octobre 2011

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L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes du Burkina a organisé la première conférence africaine sur la régulation et l’économie des télécommunications (CARET) en collaboration avec l’Ecole supérieure des télécommunications de Paris, Telecom Paris Tech. L’enseignant-chercheur de cette école, Laurent Gilles, nous expose, dans cet entretien, les défis qui attendent les régulateurs africains, sa vision de la fracture numérique qui selon lui est moins importante que la fracture économique entre les pays du sud et du Nord.


Faso-tic.net : Quels sont les enjeux de la régulation en Afrique ?

Laurent Gilles : C’est de faire en sorte que les marchés se développent de façon dynamique, c’est-à-dire qu’ils satisfassent les consommateurs et que les opérateurs trouvent leur équilibre. Les enjeux de la régulation c’est aussi travailler à la couverture du territoire de façon que la population ait accès aux services de télécommunications. C’est également insuffler suffisamment de concurrence pour que les opérateurs différencient leurs offres et innovent. Il y a donc beaucoup d’enjeux en matière de régulation des télécommunications en Afrique.

Faso-tic.net : Comment établir un équilibre dans les rapports opérateurs-régulateurs, les premiers cherchant le profit pendant que les seconds surveillent les offres de service ?

Laurent Gilles : Ce n’est pas du tout incompatible. La régulation n’a pas fonction d’éliminer tous les bénéfices des opérateurs. Elle veille à ce que les opérateurs n’abusent pas de leur position dominante. Si un opérateur fait un bénéfice exceptionnel et surdimensionné, c’est qu’il est en position dominante, la concurrence n’est pas suffisante dans ce cas. Le régulateur se doit donc d’insuffler beaucoup plus de concurrence de façon à ce que l’action concurrentielle du marché rabaisse le niveau important de bénéfice qu’il aura éventuellement constaté.

Faso-tic.net : L’Afrique entre progressivement dans la société de l’information mais la fracture numérique avec le sud est toujours importante…

Laurent Gilles : La fracture numérique entre le Nord et le Sud est moins importante que la fracture économique. Les écarts de PIB par tête entre l’Afrique et l’Europe, sont beaucoup plus importants que les écarts en matière d’usage du mobile, voire d’usage d’Internet, voire d’usage d’autres services de communication. Quand on parle donc de fracture numérique, je suis toujours étonné. La fracture est d’abord économique, en termes de revenus. Les africains sur-utilisent les services de communications par rapport à leur niveau de revenu économique.

Faso-tic.net : Quel bilan faites-vous de votre participation à la CARET ?

Laurent Gilles : Cette conférence avait pour but de mettre en rapport des communautés qui ne se croisent pas de façon courante, notamment le milieu académique, la société civile, les opérateurs et régulateurs. Nous avons pu constater, que les débats, les échanges et partages se sont passés de façon positive. Les gens étaient intéressés à intervenir pour critiquer, commenter et débattre sur un certain nombre de question. De ce point de vue, c’est une expérience vraiment enrichissante.

Faso-tic.net : Quelle est la suite après cette rencontre ?

Laurent Gilles : Nous avons demandé aux participants d’évaluer CARET. C’est au vu de ces évaluations que nous prendrons la décision d’arrêter, de continuer avec une fréquence annuelle ou biennale.

Interview réalisée par Tiga Cheick Sawadogo (stagiaire)
Faso-tic.net