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Dangers de l’Internet : Des inconvénients normaux de la modernité

mardi 13 avril 2010

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Faire respecter les données personnelles et la vie privée des citoyens, c’est la mission première de la commission de l’informatique et des libertés (CIL). Pourtant Internet a profondément bouleversé les pratiques en matière de recherche, de traitement et de diffusion de l’information. Cette tache n’est plus le monopole exclusif des journalistes professionnels.


Grâce aux forums, blogs et autres réseaux sociaux, tout le monde peut se proclamer journaliste. Pour faire connaître les dangers de l’internet et assurer le respect de la vie privée, la CIL a organisé une conférence publique sur les enjeux de la protection de la vie privée dans les médias le jeudi 08 avril 2010 à Ouagadougou.

Cinq communications sur « les enjeux de la sécurité de l’information et la protection des données personnelles et de la vie privée dans les médias », le tout modéré par le Dr Seydou Dramé, c’est ce à quoi le public a eu droit ce jeudi 08 avril à la salle de conférence du PNUD. La Commission de l’informatique et des libertés, le Conseil supérieur de la communication, le monde des médias et du droit, tous étaient représentés. L’objectif étant de donner l’information juste sur les avantages mais surtout sur les dangers d’Internet.

C’est le directeur des affaires juridiques et du contentieux à la CIL qui a débuté la série des communications. Après avoir planté le décor et donné quelques définitions utiles, place fut donnée au Dr Cyriaque Paré, spécialiste du journalisme en ligne, enseignant à l’université de Ouagadougou et initiateur du portail d’information www.lefaso.net. Internet est un canal qui regroupe tous les médias en un seul. Radiodiffusion, télévision, presse écrite ; toutes sont désormais sur la toile. La notion de médias chauds et médias froids ne semble plus avoir de sens avec l’avènement d’Internet. La presse écrite qui était chargée d’analyser l’évènement du jour se retrouve désormais dans une course effrénée d’annonces. Le journaliste qui était l’analyste du jour se trouve maintenant pris au piège de cette dictature de la toile. Il est désormais l’analyste de l’instantanéité. Il convient peut-être désormais de l’appeler « l’instantanéiste », comme le suggère Dr Cyriaque Paré, par ailleurs directeur de la communication et de l’information du premier ministère.

L’arrivée d’un 5e pouvoir

Recherche, traitement et diffusion de l’information, tous peuvent désormais le faire. Le journaliste professionnel perd le monopole d’annonce ou d’analyse d’évènement. Avec les réseaux sociaux, on parle de journalisme citoyen alternatif. Les sites personnels, les blogs, les forums de discussion permettent aux citoyens de contrôler l’action de la presse. Dr Cyriaque parle alors d’un 5e pouvoir qui contrôle non seulement l’action des trois pouvoirs traditionnels mais aussi le 4e pouvoir qu’est la presse. Le citoyen a fait irruption dans le pré-carré de la presse et a donc acquis une nouvelle place, peut-être plus importante que celle du journaliste professionnel. Ce qui doit rendre le journaliste plus rigoureux car le citoyen peut maintenant intervenir pour démentir ou analyser son travail.

Avec les TICs, les informations sont très abondantes mais fragmentées et surtout en surabonce. On parle alors de risque d’ « infobésité » qui menace le citoyen désormais obligé, s’iln’y prend garde d’ingurgiter des tonnes d’informations pas toujours digestes. L’instantanéiste n’a pas toujours le temps de recouper les informations reçues ou de vérifier les sources, donc il s’expose au risque de la « mésinformation ». Les règles de base ne sont plus respectées, vie privée et vie publique sont confondues, la crédibilité du journaliste hypothéquée avec l’entrée en action de certains donneurs d’informations sans la moindre formation.

Ces dérives ne sont pas nouvelles mais ont été démultipliées avec Internet. Ce médium multimédia permet de s’affranchir du temps et de l’espace mais pas des enjeux éthiques et déontologiques. Pour l’instant, la presse burkinabè n’est pas exposée aux dérapages de la toile car les mises à jour se font de façon journalière ou hebdomadaire en fonction de la périodicité du titre. Mais, ainsi fait, « ils ne respectent pas non plus es principes du cyberjournalisme », précise Cyriaque Paré.

Protection des données personnelles et liberté de la presse, le conflit de deux droits fondamentaux

La liberté de la presse est un droit fondamental, le respect de la vie privée aussi. On se retrouve là face à deux droits fondamentaux qui, chacune empiète sur l’autre. Que faire pour trouver un équilibre ? C’est la plus grande interrogation à laquelle on n’a pas encore trouvé de réponse. Les risques et dangers sont énormes et concernent tous les domaines. Le non respect du secret médical, l’immixion dans la vie privée, l’utilisation abusive de l’image, l’utilisation d’un bien meuble ou immeuble ; ce sont autant de cas de violation de la vie privée. Le législateur a prévu des sanctions en cas de violation de la vie privée d’un citoyen mais souvent il n’y a pas de jurisprudence pour s’en inspirer, regrette l’homme de droit Kassoum Kambou. La véritable difficulté dans la régulation, c’est l’extraterritorialité d’Internet, ajoute M. Songré, secrétaire général du conseil supérieur de la communication. Pour réussir sa mission, le CSC a besoin de collaboration trans-institutionnelle et dynamique, précise-t-il.

Jusque là tout semblait aller pour le mieux. Quelques risques de dérapages sont énoncés par ci, par là sans véritablement attirer l’attention de grand monde. Après deux heures, le modérateur annonce le 5e et dernier intervenant de la soirée : Lassani Ouédraogo, Secrétaire général de la CIL. Il traite des dangers de l’Internet et de la téléphonie mobile. « Les dangers sont énormes et il n’y a pas de confidentialité lorsqu’on a le portable sur soi, même s’il est éteint », lance-t-il. Il y a toujours un moyen de l’activer à distance. Il n’en fallait pas plus pour qu’une peur glaciale envahisse la salle. Puis, il a égrené un chapelet de dangers liés aux TICs (Internet et téléphonie mobile). Heureusement, il n’y a pas péril en la demeure, rassure-t-il en conclusion. Il faut tout simplement s’informer et savoir les précautions à prendre. Puis, il cite quelques mesures protectrices (voir le site de la CIL, www.cil.bf).

Bientôt, la fréquentation des cybercafés sera règlementée « Les conditions d’accès et d’utilisation des cybercafés sont en étude à la CIL et très bientôt, une charte avec les gestionnaires des cybercafés sera signée », annonce le secrétaire général de la commission de l’informatique et des libertés. Ce qui offrira plus de possibilité de contrôler les utilisateurs et de démasquer d’éventuels escrocs et mieux protéger les enfants.

Car, la vie privée bafouée, des contenus de données piégés, des interventions malveillantes, des informations partisanes et erronées dans le traitement et la diffusion de l’information, les dérives sont énormes avec l’instantanéité qui rythme désormais le travail du journaliste. Pourtant, « le recoupement de l’information, la vérification des sources, l’honnêteté intellectuelle, le respect de la vie privée sont des contraintes valables aussi bien dans les médias traditionnels que dans Internet », souligne Cyriaque Paré. Les défis déontologiques sont les mêmes ; rigueur, intégrité…

Moussa Diallo
Lefaso.net